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vendredi 24 décembre 2010

Noël

Ma muse ce soir est absente !
Elle a fui ! Ce n’est pas souvent...
J’ai beau frapper au contrevent,
Rien ne répond à mon attente...

Comment répondrais-je à ces voeux
Qui s’accumulent sur ma table ?
Ou trouver la formule aimable,
Lorsque le ciel se fait grincheux ?

Mon coeur est plein..Ma tête est vide :
Sans ma muse je ne sens nu :
Je n’ai que des mots convenus
Qui font des phrases insipides...

C’est ma faute je le conçois,
Si, me laissant dans la déveine,
Ma muse cour la prétentaine !
Comment ne compter que sur soi ?

Oh, je sais bien la mécanique
D’aligner des mots cadencés,
Mais je ne les sent point danser,
Pour le discours ou la réplique !

Voila pourquoi ma tête est lourde !
Et oui, le vide pèse aussi !
D’être pleine de mon souci,
Je la sens comme une cougourde !

Vais-je me traîner jusqu’au chai
Pour chercher dans une bouteille,
Ce qui fait que l’on appareille,
Loin de l’ennui qu’on remâchait ?

Mais non voyons, que je suis bête !
J’ai oublié que c’est Noël !
Jamais on ne vit rien de tel
Pour enchanter notre planète !

Et déjà je ne sens moins sot :
Non, ma muse n’est pas volage :
Me devançant pour rendre hommage,
Elle est la-bas, près d’un berceau...


Momas le 23 Décembre 2010

Alexis Arette

jeudi 23 décembre 2010

Nadau

Û die négre de bén-plouy y d'aygue-nèu, rét. En se-n tournan de-s ha couya, Jusèp que coussirè, tougnut, cap y coth enas espalles. Qu'abè tabé croumpat ûe fougasse.

- « Qué hès ? Si hès coùrre lou machan téms, qu'as escadut, ci-m sémble.

- « O, que-m abi tirat plans ta ha drin de légne… En se desarrigan, û castagnè dou plèch que-m a hèyt càde dus poumès. Que y a de qué ha. Que créy que-m caleré telefouna ou escrìbe à la meteo enta que hè ha bèt. Sinoûs que bau aténde la lûe de Nadau. Qu'éy ta de oéy en oéyt. Lou téms que-s deberé arrebira. Ou lhèu tau Pay de Nadau ? E-m aberé entenut y escoutat ? »

- « Hû !... Menchide-t d'aquét, sustout au noùste àdye. En badén biélh, qu'éy badut abìlle. N'engaline méy que lous maynats, ou lous qui bòlen decha-s engalina. Que-s counténte de da au méy aysit y au méy pressat. Tè, que boulèm demanda-u, l'an passat, la mama y you, séngles youlhs de recàmbi, y, e sàbes ço qui-ns a dit ? Que nou hasè méy aquét artìcle. Lou moùnde que bàden toustém méy biélhs. Biélhs que-n y a de méy ana méy, que soun hère trops à l'at demanda, y nou-s y pot tapoc hourni-u ne prou, ci dits. You que créy, ta dìse la bertat, que n'éy pas tan rìche coum dìsen. Y ét tabé, enta-s acama, ne bat pas hère lèste : que-s hè carreya sus ûe trasse. Alabéts, ta nou pas ha yelous…

- « Que-ns goàrde au ménch boû estoumac, ci digou la mama en pausan la toupîe de la soupe sus la taule. Tè, serbéch-te, Jusèp. »

Garbure hèyte de frésc, dus hourrups de goudale – qu'éy passat lou téms de la goudale de doùdze hourrups, y que cau counta dap lous esbagats de las casquétes - chingarre nabe y oéus dap fougasse… y batalère en boune coumpanie. Que cau entertiéne lou cos enta que l'amne nou-s y abéye y que-s y demoùre. Au diàble lou machan téms, la légne à ha, y lous youlhs qui arrougagnen !


À miéy matî de Nadau que-m tumèy dap Jusèp ena pourtalade de la glèyse. Autalèu, y dap quin plasé, qu'ou héy ma noubèle : ûe arrehilhe, atendude ta cap d'an, qu'éy badude à miéye-noéyt ! Quin Nadau ! B'éy toustém Nadau tau qui n'éy ni trop biciat, ni trop tentat !


Jan de Sègues

lundi 20 décembre 2010

Marilis Orionaa sur Radio Albigés

À l'occasion d'un concert donné près d'Albi en octobre dernier, Marilis Orionaa a accordé une interview à Radio Albigés. Elle y évoque son parcours et les difficultés qu'elle a rencontrées du fait de la censure occitaniste. Elle fait également part de son admiration pour la chanteuse ariégeoise Rosine de Pèyre, ou encore le poète béarnais Alexis Arette.

vendredi 17 décembre 2010

Cu d’an..

Amics, l’an qui s’en ba, n’èy pas la fî dou moundé !
Benalèyes, trebucs, patacs, en dap aboundé,
Autan coum s’en y bi, qu’en bederam toustem !
Toustem ta la yoentut, lou temps qu’èy û lè nobi,
E si boulem sauba lou moundé de l’ahobi,
Qué ba calé, drin mèy encoère que si hem !

Las esteles s’an dit, qu’escribin sus la terre,
Lou destî d’û cadû dinqu’a l’ore darrère..
Mes entertan, qu’arpatéyam, que hèm pérém !
Per dus milles ans d’autés lugrâs qu’en se hèn sinné,
Mes tan se destraba, e que l’esprit e pinné,
Que ba calé drin mèy encoère que si hem !

Dusquantes qu’an lou cap pergut de ninaroles !
Qu’an boulut apoupas a d’estranyés escoles,
Mes nous, d’aquere leyt de saume, nou-m boulém !
Que n’a heyt tripe-harts, mes bestis coum arrasclés !
E taus balha l ‘arsec de tourna badé masclés,
Qué ba calé drin mèy encoère que si hem !

Certes, dous coumberti, qu’abém grane tentèri,
Mes pourta lou péguè tau clot dou cemitèri,
Chens que tourné praba, cau pas trop qu’èy rèbém !
Permou, taus apoudya, la bie qu’èy estréte,
E sounque soulamen ta la counserba dréte,
Que ba calé drin mèy encoère que si hem !

Embiade :

Prince de las bertuts qui sabém las de case,
Ayudat-sé ta la ha balé per l’estrem !
Permou qu’en ta tira l’eslame de la brase,
Que ba calé drin mèy encoère que si hem !

St Maixent – lou 17 dou mesMourt
Alexis Arette

samedi 11 décembre 2010

Au Nabeth Françoès !

Par Jean-Marc Casamayou
Après le Yan Petit qui dance, on pourrait demander à Alexis de nous distraire avec un François qui rit François qui pleure (si ce jour là La Muse Mayrane est avec lui).

Les propos de Françoès Vairon portent toutes les contradictions propres à ce fameux "centre mou" que personne n'arrive à situer sur l'échiquier politique. J'en ai compté ces derniers temps près d'une demi-douzaine! De quoi y perdre son latin et celui des autres!
Ainsi nous pouvons lire, "béarnisants", "occitanistes", "béarnais", "occitans". On lit aussi que la "famille occitane " est "la famille des langues d'oc" (au pluriel! sic!) et que ce qui est transmis dans les calandretas c'est du Béarnais mais "sous le nom générique d'occitan" (dommage que ce ne soit pas remboursé par la Sécurité Sociale, alors que c'est prescrit par les Docteurs ès occitan) qui n'est pas "une langue artificielle". Et côté artifice, le François il s'y connait, même s'il y a quelques temps que le feu semble éteint!

Et il finit en digne successeur d'Henri IV, Lou Nouste Françoès se verrait bien en Maire de Pau (au minimum et par défaut), prenant un arrêté municipal pour mettre fin aux guerres de religion qu'il a lui même attisé en devenant l'un des parrains de ce fameux "opérateur régional ", l'Inoc (qui a un site internet en panne depuis des mois, sûrement un manque budgétaire...). Il en appelle à ses amis, mais lesquels?

Alors s'il veut sauver "nos langues" (encore au pluriel?), il serait temps qu'il y retrouve son latin et sa musique; et qu'il abandonne le Se canti (générique) pour Aqueres Mountagnes (authentique).

Mais je crains que pour lui, elles ne soient "tan hautes" qu'elles ne s'abaisheran pas! Le Gave de Pau n'est pas un nouveau Rubicon (en un seul mot!).

Il est pas donné à tous les fils de Pau de devenir un jour Roi de France car côté génétique il ne peut y avoir aucun générique!

Au Nouste Enric!


Eth Baretounés

jeudi 9 décembre 2010

N’abéran pas, lou Biarn ni la Gascougne (chant)

Après la guerre de 70 fleurirent en France les chansons « de la revanche », dont la plupart forcaient quelque peu sur la « barbarie » Allemande..Je me souviens encore de ces titres car ces chansons furent chantées bien après la revanche de 14-18. Les plus sentimentales étaient certainement : « La ferme des Rosiers », et « C’est un oiseau qui vient de France » Mais celle qui fut d’ampleur Nationale car elle sonnait comme un défi, c’était : « Vous n’aurez pas l’Alsace et la lorraine, car malgré vous, nous resterons Français : Vous avez pu germaniser la plaine, mais notre coeur, vous ne l’aurez jamais ! ».

Je me suis amusé ce matin a en reprendre le thème très librement. Avec une cadence qui pourrait se chanter sur le même air.



Puplé Biarnés e puplés de Gascougne,,
Debienguts Frays, despuch mèy de mille ans,
Qué hém casau per abé bère pougne,
Au pugn de ha grane embeye aus gourmans !
Oey trachamans, mèy ignourens que crabes,
Tout en estan mèy hagars que pedoulhs,
Qu’an saunéyat d’en se hica las trabes,
Dap û parla qui nou baù qu’arrangoulhs !

Repic : N’abéran pas, lou Biarn ni la Gascougne,
Permou toustem, qué seram en deban,
Si soun cascans, qué-s bouchén la bergougne,
Mes loegn d’ assi, Grand digne Dieù Biban !

Arrebatiats, per l’escole estranyère,
Oun lous boutèn l’anèle au cap dou nas,
Pareils lous porcs bouats a la pélère,
Qu’an sounque au cap lou tésic d’arpasta-s...
Nous auts assi, que pourtam l’érétadyé
D’aquets balens qui saboun truca hort,
Quan l’estranyè boulou prené abantadyé,
En ta héri, e la Baque e lou For !

Quan lous bedém, crucifica la Baque,
Sus ûe crouts, d’oun Diù ey espudit,
Sie si cau per l’agulhoû qui chaque
Mes lou parsâ que sera desgandit !
Sie Mespléde ou sie Lamourine,
N’èy pas Muret, ou sé caguèn dessus !
Ta nous subi la corne de Houchine,
Qu’anen aulhou t’a s’arraya la pus !



Lou 9 Dou MesMourt.

Alexis Arette

Lou temps de l’Aubos..

Segu que passerèy pucha que tout que passe..
E lheù chens a-t sabé, que souy presqué passat !
Qu’èy l’eschère souben qui reclame l’escasse,
E que m’an de pertout quan de cops pédassat !

Ségu, permou dou malandrè, nou-n baù pas bisté,
Qu’en baù toutu, chens que m’estangué lou miscap !
E tout en han semblans de nou pas esta tristé,
Que hèy de bets passeys... au men hens lou mè cap...

S’arribe, coum an dit, la sayesse dab l’adyé,
Que-m semble abé coumprés, per delà l’enlusioû,
Que lou temps d’exista, qu’èy lou d’apprentissadyé,
Mes que y’a drin mèy loegn l’assès de la maysoû..

Qu’èy biscut per lou hoec d’oun l’estele s’abite,
Qu’èy biscut per l’aurey qui hè dansa l’ausèt,
Qu’èy biscut per la hount oun l’aygue s’esperlite,
E la terre qui da lou blat toustem nabèt..

Qu’en s’an crucificats sus las quaté mabences,
Oun lou tribalh hè chic de place enta reba,
Enter las amistats e las mariboulences,
L’omi que s’esdebure... e nou sab goère oun ba ...

O ségu qu’èy bertat que nou y’a pas enyence,
Si nou s’abrasse pas lou Pay en dab la May !
Pucha qu’en s’an semiats, qu’èm lheù tabé semence ?
Mes qu’abém lou regrèt dou beroy mes de may..

« Nou-t dèches pas yumpa per lou temps qui s’escape,
Coum la yoene maynade au truc de l’anyélus,
S’escapè, quan dou ceù lugreyabe la cape,
En te dechan au co quan de nuadyés blus... »

« Au briù ,que t’a-s trempat lous pots, a la courrude,
Mes l’andade ou bebous deya loegn que s’en ba..
Qu’a-s alétat l’estiù sus ûe gorye nude,
Mes l’aram d’û moumen lou ben qué l’escouba... »

Mes tout aco qu’esté ! Si nou-n sabém l’encaùse,
-La canille nou sab que sera parpalhaoù !-
E l’amou per moumens assi bach quan s’apause,
Si-n se trobe au sou grat, qu’en s’apoudye t’oun boù ! »

« Anem! Prou de pensa ! l'aube que gouyateye! Desplegue-t bielh apè ! Segoutech-té lous os ! Hè semblans de nou pas esta lou qui s'abeye, Même si lou tou temps ey lou temps de l'aubos...

Lou 9 dou més mourt .

Alexis Arette

vendredi 3 décembre 2010

Un bon point, M. Bayrou – Maintenant, allez jusqu’au bout !

Par Jean Lafitte, docteur en sciences du langage

Ce matin même, M. Triep-Capdeville, président de l’Institut béarnais et gascon, a attiré par message l’attention de quelques membres de l’association sur certains propos de M. Bayrou rapportés par la presse paloise d’aujourd’hui. Comme M. Bayrou juge que la querelle entre béarnisants et occitanistes est “bête à pleurer”, il a rappelé que les prises de position pro-occitanistes de ce personnage politique n’étaient pas étrangères à cette querelle : « Il n’est donc pas au dessus de la mêlée… ».

Comme j’ai beaucoup d’estime et d’amitié pour Maurice Triep et entretiens des contacts cordiaux avec François Bayrou, je me dois d’apporter quelques éclairages en vue de conduire tous les amoureux de la langue béarnaise et gasconne sur les chemins de l’entente.

D’abord, voici exactement le passage du vaste tour d’horizon auquel s’est livré M. Bayrou, en tant que meneur (j’ai horreur de l’anglais leader qui ne signifie pas autre chose) d’un parti politique :

Une querelle à pleurer !

François Bayrou s’est exprimé sur la querelle « béarnisants et occitanistes » « Cette querelle est à pleurer. Voilà une langue menacée de disparition, et ceux qui l’aiment se partagent en deux camps, occitans contre béarnais, qui se combattent à mort ! Les choses sont pourtant simples : notre langue, c’est le Béarnais. Le Béarnais est une langue gasconne. Le gascon appartient à la famille occitane, la famille des langues d’oc, qui viennent directement du latin dont elles ont hérité la « musique », (l’accent tonique remontant), et une bonne part du vocabulaire.

Dans les calandretas ce qu’on transmet, sous le nom générique d’occitan, c’est le Béarnais, ce n’est pas une langue artificielle ! Il est temps de cesser les guerres de religion ! Si mes amis pouvaient arrêter de se disputer et tous convenir que le seul enjeu qui vaille, c’est de sauver nos langues, alors j’en serais très heureux. »



Lisant cela en « expert » — excusez mon manque de modestie —, je serais plutôt tenté de féliciter M. Bayrou : pour autant que je sache, c’est la première fois qu’il affirme très claire-ment dans une déclaration publique « Le Béarnais est une langue gasconne » ; l’« occitan » est une famille linguistique, pas une langue, c’est un autre nom de « la famille des langueS d’oc » au pluriel.

Sur le fond, c’est à peu de chose près notre thèse, et celle des linguistes de tous pays qui ont étudié nos langues et ne se bornent pas à répéter les dogmes occitanistes. Et c’est contraire à ce qu’affirme avec superbe M. David Grosclaude, digne fils de son père et pour qui le béarnais n’est qu’une sous-variété de la « la langue occitane ». Dans le Proclam de Pau évoqué par Maurice Triep, M. Bayrou les avait salués ainsi : « Miquèu e David Grosclaude, lo pair deu costat deus sapients e lo hilh deu costat deus comunicators ». sapién, M. Grosclaude avait l’honnêteté de ne pas en revendiquer le titre, puisqu’il avait écrit huit ans plus tôt « Que’m senteishi mei istorian que non pas lingüista » (Drin de tot, 1985, Préface, p. VI) ; ce qui permet d’apprécier à sa juste valeur son affirmation péremptoire en p. 10 du Petit dictionnaire français-occitan (gascon) de Per noste-La Civada, 1984 : « Il existe indiscuta-blement une langue occitane ou langue d’oc. Cette vérité est reconnue par tous les linguistes du monde : elle n’est contestée que par des détracteurs incompétents ou malveillants. » Il ne citait aucune de ces linguistes du monde (sans doute en connaissait-il trop, mais il est parti dans l’autre monde avec son secret), alors que j’ai à la disposition de tous les curieux un recueil de citations de linguistes français et étrangers qui disent depuis plus de 130 ans que le gascon est une langue distincte de tout le reste du domaine d’oc[1] . Je me situe dans leur camp, M. Bayrou aussi, à vous de décider si nous sommes incompétents ou malveillants. Quant au fils, avec La Setamna et autres bulletins de sa “paroisse” — le mot est d’un occitaniste lucide et honnête —, « comunicator » est bien le terme adéquat : ça commence comme communication, nom actuel de la propagande des années 1930, si bien théorisée par le défunt Joseph Goebbels (cf. « Plus le mensonge est gros, plus il passe ») ; et ça finit comme terminator…

Mais je reviens à M. Bayrou : d’abord, la « langue béarnaise » n’est pas à proprement parler « une langue gasconne », mais le nom historique — bientôt 500 ans ! — des parlers gascons en usage dans l’ancienne vicomté de Béarn, parlers gascons sans homogénéité et dont aucun trait linguistique ne s’arrête aux limites historiques du Béarn. Mais ce n’est qu’un détail, et la conscience d’avoir une « langue béarnaise » compte pour beaucoup dans la détermination des Béarnais à vouloir la conserver.

Cela précisé, cette déclaration montre que M. Bayrou a fait son chemin, et il est très loin du pseudo-œcuménisme rassembleur de son Proclam de Pau, où il a dit : « E nosautes, bearnés, gascons, occitans » ou encore « Lhèu qu’at avetz vist, qu’èi circulat shens hèra de precaucions entre nocions qui son totas atrapaderas. Ací qu’èi dit : occitan, ací : gascon e alhurs : bearnés. »

Mais aussi de façon plus précise : « qu’avem tanben a conéisher de tira quau ei l’estat exact deu parlar bearnés e gascon », en oubliant l’« occitan ».

Parenthèse : c’est écrit à l’occitane, d’après le texte qui me fut communiqué officielle-ment par son cabinet de président du Conseil général, mais c’est du béarnais très courant, avec des gallicismes comme ci-dessus alhurs pour alhous, en d’autres endroits, mèma pour medich ou medix etc. La graphie occitane n’est même pas toujours exacte, avec pour couron¬nement le dernier alinéa qui est, à trois o pour ou près, en bonne graphie moderne de l’Escole Gastou Febus (E.G.F.). J’en ai conclu que M. Bayrou avait d’abord écrit naturellement son texte en “patois” de Bordères, et à la mode des Félibres, puis l’avait laborieusement mis à la norme occitane qui était dans le vent, s’arrêtant épuisé juste avant le dernier alinéa !

J’insiste donc : puisque c’était un discours, à l’oral il n’a dû choquer aucun Béarnais qui connaissait sa langue, et il n’aurait pas eu besoin d’être traduit pour être compris d’un Gascon connaissant lui aussi sa langue. Et je supplie tous mes amis de reconnaitre que Lapassade et Peyroutet n’ont pas changé de langue quand ils ont abandonné la graphie moderne pour l’occitane, ni Peyroutet une seconde fois en revenant à la graphie moderne.

Ce qui ne m’empêche pas de dire haut et fort que la graphie occitane est une aberration sociolinguistique et pédagogique fondée sur une lecture erronée des anciens textes, y compris en languedocien, et sa justification par l’unité de l’« Occitanie » est une aberration supplémentaire, car il n’y a jamais eu d’« Occitanie »… Et ce n’est pas demain la veille que les habitants du Midi de la France voudront la faire, comme l’aurait aimé le Pr. Patrick Sauzet dans l’éditorial du n° 11 d’octobre 1998 du bulletin de l’Institut occitan de Pau (aujourd’hui à Billère) et comme le suggère Ben Vautier que je viens de citer en note.

En outre, elle est devenue contraire à la Constitution, puisque l’article 75-1 sur les langues régionales, introduit en juillet 2008, les déclare comme appartenant au patrimoine de la France, et qui dit patrimoine, dit bien reçu des ancêtres et transmis de génération en génération, sans rupture. Or seule la graphie dite « moderne » répond à ce critère, car sa modernité est caractérisée par une adaptation continue à l’évolution de la langue et à son contexte socioculturel. Alors que la graphie « occitane » ou « classique » est une graphie de rupture avec l’héritage, par un retour artificiel à des conventions médiévales qui ne sont même pas celles du passé béarnais.


J’en viens maintenant au rappel par Maurice Triep des causes de la responsabilité de M. Bayrou dans la querelle entre béarnisants et occitanistes. Ça me rappelle le triste fait divers de début septembre que fut le meurtre à Lescar d’un « un formateur en langue occitane » par l’époux d’une dame qui rendait trop souvent visite à ce jeune homme : c’est « à en pleurer », comme le dit M. Bayrou de la querelle linguistique. Le mois avant, un drame similaire avait couté la vie à un père de famille d’Espalion en Aveyron. Mais dans notre Béarn qui se moque facilement des Bertans de las cournères, on comprend aussi que parfois Bertran attrape un grand couteau ou décroche le fusil.

Or dans la querelle linguistique, j’estime qu’avec l’argent de tous les Béarnais, M. Bayrou a fourni l’appartement où se déroulent les rencontres qui ont cocufié tous les amoureux de la vraie langue béarnaise.

Il avait promis, dans son Proclam du 25 octobre 1993 : « Que vau propausar de bastir, de cap a l’Universitat, lo centre de la lenga e de la cultura bearnesa, gascona, occitana. » Et vers la même époque, lors d’un festival de Siros, il avait promis un « Institut culturel béarnais et gascon » parallèle de l’Institut culturel basque créé en 1990.

En fait, grâce à une habile manœuvre du genre de celle qui introduisit « la langue occitane » dans la loi Deixonne du 11 janvier 1951, avec d’ailleurs l’assentiment du Félibrige, c’est un « Institut occitan » qui a été créé avec pour premier président M. Jean Salles-Loustau, proche voisin et ami politique de M. Bayrou qui, peu après, le nommait Inspecteur général de l’éducation nationale chargé des langues régionales.

Or M. Salles-Loustau avait déclaré dans une interview à la presse paloise du 15 mars 1995 : « On n’est pas là pour enseigner le patois. Le patois est mort, c’est l’occitan qui reste ». Il avait dit aussi « Sur les 13 millions de personnes qui peuplent les 30 départements d’Occitanie, 6 millions d’entre elles comprennent l’occitan. », en annexant à l’« occitan » tous ceux qui parlaient le « patois » qu’il envoyait au cimetière.

Je vais cependant essayer de comprendre, sinon justifier, M. Bayrou. Il est né quelques mois après la publication de la loi Deixonne, avait neuf ans quand Roger Lapassade et ses amis ont fondé Per noste dans le cadre de l’Institut d’études occitanes (I.E.O.), alors que l’Escole Gastoû Fébus vivait les dernières années de Michel Camélat (1871-1962) et Simin Palay (1874-1965) qui la présidait depuis 1923 ; et M. Bayrou avait 17 ans en mai 1968, année de son baccalauréat : toute sa jeunesse a été entourée d’occitanisme béarnais et gascon (à Bordeaux), mouvement conduit par d’authentiques Béarnais et Gascons qui croyaient voir dans cette orientation le salut de leur langue autochtone bien mal en point. Le vide intellectuel était tel que Michel Grosclaude, professeur certifié de philosophie au lycée d’Orthez, allait devenir le maitre à penser de ces braves Béarnais, alors qu’arrivé du nord de la France en 1958, il prenait le béarnais pour du latin appris au lycée (cf. son article « Comment je suis devenu occitaniste », Per noste n° 15, Nov.-Dec. 1969, pp. 5-6). Mais justement, avec probablement Robert Darrigrand, agrégé d’espagnol mais de 9 ans son cadet, il était un des rares à savoir le latin parmi ces enseignants d’Orthez. Et il ne manquait ni d’aplomb, ni probablement de l’envie de compenser son modeste niveau hiérarchique dans le monde de l’éducation.

François Bayrou s’étant à son tour dirigé vers la carrière d’enseignant, il a été reçu au concours de l’agrégation de lettres à 23 ans. Agrégé de lettres, et non linguiste. Il a donc pris pour argent comptant le discours linguistique des occitanistes, l’idée ne lui venant probable-ment pas d’en douter, puisque c’étaient des enseignants, et qu’en 1993 il voyait un sapién en M. Grosclcaude. Et il n’y avait alors rien qui lui permît d’en douter. Même notre ami Jean-Marie Puyau, dans son mémoire universitaire sur le béarnais de 1985, avait alors choisi une graphie basée sur celle de l’I.E.O. :

« La graphie de l’I.E.O. accentue la dépendance du béarnais comme sous-dialecte de l’occitan. Celle de l’E.G.F. peut sembler au contraire trop calquée sur le français. C’est ce qui m’a fait en définitive choisir une quatrième [sic] solution, la mienne. A dire vrai, j’ai pris pour l’essentiel l’ortho-graphe dite «normalisée» de l’IEO, parce qu’elle est mieux admise dans les milieux universitaires et parce qu’elle rend mieux compte de certains aspects de la langue : genre masculin ou féminin des finales, désinences de l’indicatif et du subjonctif. » (Livre – Un universitaire breton étudie la phonologie du béarnais, article et interview par Louis Laborde-Balen, l’Éclair, 1986).

Moi-même, je ne pensais pas autrement, n’ayant trouvé que l’I.E.O.-Paris et les occitanistes du Béarn pour m’apprendre le béarnais de mes ancêtres maternels et m’ouvrir au gascon de mes ancêtres paternels. Or j’ai eu la chance d’être mis à la retraite en 1988 à 58 ans, limite d’âge de mon grade de colonel, et de pouvoir me consacrer à fond à l’étude de cette langue que l’I.E.O.-Paris me demandait d’enseigner l’année suivante. C’est dans la bibliothèque de cette association où j’assurais des permanences bénévoles que j’ai trouvé les petits cailloux blancs qui allaient me permettre de trouver mon chemin et sortir de la forêt broussailleuse et sombre de l’occitanisme.

Dès 1996, j’ai pu ainsi lever l’étendard de l’indépendance linguistique du gascon (Le gascon, langue à part entière et le béarnais, âme du gascon), le début de ce titre jusqu’à « et » étant emprunté au Pr. Pierre Bec, ancien président de l’I.E.O. Mais je tenais toujours à la graphie classique que j’ai continué à enseigner jusqu’en 2003. Or en 2002, je m’étais inscrit en thèse en vue de traiter de l’amélioration de cette graphie pour la rendre plus fidèle à la phonologie du gascon. C’est dans les six premiers mois de ce travail que j’ai découvert les erreurs historiques qui étaient à la base de la graphie classique : scientifiquement, je n’avais plus aucune raison de la conserver, d’autant qu’elle compliquait très sérieusement l’enseigne-ment de la langue. Je l’ai donc abandonnée à la rentrée 2003, sans provoquer de révolte de mes élèves, plutôt soulagés. Et ma thèse en a proposé quelques améliorations.

Mais quand je constate l’ignorance de mes propres amis sur ces sujets, et plus encore celle des occitanistes, encore moins curieux de savoir, il faut bien admettre que M. Bayrou n’en sache pas grand chose. Il en savait encore moins il y a quinze ans, et il n’est pas sûr qu’il ait été machiavélique en laissant se créer l’Institut occitan à la place de l’Institut culturel béarnais et gascon qu’il avait annoncé. Sans doute était-ce pour lui blanc bonnet, bonnet blanc.

Aujourd’hui, il peut mesurer les dégâts d’un laisser-faire qu’il crut peut-être habile. Avec la perspective pas du tout illusoire de voir la justice déclarer illégaux chez nous le nom d’« occitan » et la graphie occitane. Ce qui impliquera l’interdiction pour toute collectivité publique d’en user directement et de subventionner, en argent ou en moyens matériels, toute institution privée qui s’en réclamera.

Au nom de l’amour que nous portons tous à notre langue béarnaise et gasconne, je dis donc à M. Bayrou : « Allez jusqu’au bout ! ».

Avec tout votre talent de parole et les relations que vous avez dans les milieux politiques d’une part, occitanistes d’autre part, faites leur comprendre que le mirage occitaniste est sur le point de se dissiper et qu’il leur faut délibérément tourner la page : bannir le mot « occitan », qui n’a pas plus sa justification que le terme générique de « germain » pour désigner le néerlandais, l’alsacien ou le flamand, et ne plus user que de la graphie moderne, qui a ses racines dans nos chartes d’avant 1300 : au lieu de passer un temps fou à écrire contre nature, pour ensuite se casser la tête pour bien lire cet écrit, l’ancien ministre de l’éducation nationale n’a pas besoin qu’on lui fasse un dessin pour voir le temps gagné pour l’apprentissage de la langue elle-même.

Courage, cher ami, sur les pas d’Henri IV, un édit de Nantes est possible dans le respect de la vérité historique et linguistique et de la loi désormais en vigueur. C’est notre seule ambition, et nous vous aiderons si vous le voulez bien.

Jean Lafitte
 
[1] Le dernier venu est Ben Vautier, alias Benjamin Vautier, peintre français d’origine suisse né le 18 juillet 1935 à Naples de mère irlandaise et occitane et de père suisse français, tout autant de raisons d’être occitaniste. En aout 2009, le Sénateur Michel Charasse avait signalé au Premier ministre les vives inquiétudes des tenants des langues parlées dans les régions de Nice, du Béarn, de la Gascogne, de l’Auvergne, du Limousin et de la Provence devant les privilèges exorbitants reconnus à l’occitan. M. Vautier lui avait alors répondu sur son blog (“copié-collé”, fautes comprises) : « tous les linguiste vous diront que le bearnais le gascon le nissart le provencal etc sont des langues d’oc par raport aux langues d’œil pourquoi pas accepter de les laisser se reunir et se regrouper pour survivre ? »